Analyse du camp de développement : Une défensive dominante et un « nouveau » nom à retenir

Je me suis déplacé hier du côté du 10/30 et du Complexe Bell à Brossard comme j’aime bien le faire à chaque mois de juillet quand les circonstances le permettent. J’en suis ressorti avec deux certitudes.

(C’est déjà mieux que Descartes, diront les plus fins observateurs!)

Première certitude:  L’inventeur des Crocs est un sombre individu qui a créé un produit infiniment laid et inconfortable pour mes pieds.

Deuxième certitude : Le futur du CH à la défensive est très prometteur.

Avant d’aller essayer des Crocs pour la première fois de ma vie – 5 paires toutes plus abjectes les unes que les autres – j’ai donc assisté au match Rouges contre Blancs hier à Brossard.

J’ai davantage, et de beaucoup, apprécié cette première partie de mon périple!

Voici six réflexions qui complèteront et corroboreront quelques-unes des remarques que vous a livré hier mon collègue Marc-Olivier Cook sur la fin de ce camp de développement.

1. Domination claire et nette des défenseurs

Je n’avais pas de chronomètre sur moi, mais j’ai la conviction que les défenseurs des Rouges et des Blancs ont eu la rondelle sur leurs palettes environ 75 % du temps, sans exagérer. Genre, sérieux-sérieux.

Oui, ce n’était que du quatre contre quatre et il est normal que les défenseurs contrôlent davantage la rondelle dans cette phase de jeu, mais quand même…

Faut dire qu’à lui seul, Lane Hutson a dû contrôler l’objet pendant 10 minutes.

Hutson qui s’échauffe avant la partie…
(Crédit: Tony Patoine)

Ok, là j’exagère un peu, mais sans blague, le petit Américain a sans doute fait du breakdance avec le caoutchouc deux fois plus longtemps que son plus proche poursuivant.

Joshua Roy? Logan Mailloux? Filip Mesar? Adam Engstrom? Xavier Simoneau? Un de ces cinq-là…

Le jeu ne semble jamais mourir avec Hutson. Ce qui serait pour d’autres des jeux à haut risque, comme feinter un ou deux joueurs en sortie de zone ou encore à la ligne bleue adverse, ne semble être pour lui que des jeux de routine. Et souvent, lorsqu’on pense qu’il va perdre la rondelle, il la reprend une fraction de seconde plus tard en étant plus vif et agile que son opposant.

C’est simple, comme le dit lui-même le principal intéressé, « des erreurs il y en aura toujours de toute façon, alors, tant qu’à faire, je préfère faire des jeux avec la rondelle ».

De mémoire, je ne me rappelle pas d’avoir entendu un espoir du Canadien parler de la sorte avec autant d’assurance. La question ne semble même pas se poser pour Hutson. Disons que ça tombe bien, car c’est une philosophie avec laquelle son futur coach Martin St-Louis est plutôt en accord.

Cela dit, on l’a quand même vu se faire contourner assez aisément dans sa zone à quelques reprises. Disons qu’il doit encore améliorer son patinage de reculons et son jeu sans la rondelle.

À cet égard, on peut voir que Reinbacher, même si ce n’était pas toujours parfait, lui sera d’un grand secours dans son territoire. Offensivement, il est aussi venu bien près de marquer à au moins trois reprises sur les passes de son créatif ami.

Hutson et Reinbacher
Les deux font (déjà) la paire.
(Crédit: Tony Patoine)

Cela dit, au-delà de Lane Hutson et Reinbacher, globalement, la journée d’hier n’a fait que renforcer davantage l’idée que le plan de l’état-major est d’établir une défensive hors norme qui lui donnera à terme un avantage compétitif sur le reste de la LNH.

2. Adam Engstrom : de l’ombre à la lumière

Bien sûr, tout le monde qui n’était pas un enfant de 4 ans scotché sur la tablette de ses parents ou le nez dans la fond de sa Slush Puppie bleue aura remarqué Hutson et le duo dynamique qu’il formait avec le p’tit nouveau, David Reinbacher.

Mais, il fallait être pas mal du même niveau de myopie que M. Magoo pour ne pas remarquer le match colossal qu’a livré Adam Engstrom au côté de William Trudeau. Engstrom a sans doute été mon coup de cœur de la journée.

À mes yeux, c’est lui qui a été le meilleur défenseur sur la patinoire hier, alliant efficacité et créativité tout au long de la rencontre.

Engstrom
Engtrom patrouille la ligne bleue avec aplomb.
(Crédit: Tony Patoine)

Ce gars-là mérite qu’on parle de lui dans la même phrase que tous les autres bons jeunes défenseurs de l’organisation, et même que l’on commence à penser à placer son nom avant d’autres plus en vogue dans la hiérarchie défensive de l’équipe.

Bref, il est plus que temps qu’on se mette à jour à son sujet!

Après l’avoir vu sur la première paire de la Suède au CMJ (U20), on savait déjà que Engstrom, 6’2, 193 livres, était bon défensivement et qu’il patinait très bien dans toutes les directions. Puis, il a terminé la saison en force à Rogle et été de l’avis de plusieurs le meilleur joueur des siens en séries éliminatoire en y allant d’une performance de 5 points en 9 matchs.

Hier, en plus d’avoir livré une passe nécessitant une vision du jeu, une passe camouflée drette su’l tape de Jack Smith qui a par la suite marqué sur un excellent tir, Engstrom nous aussi montré qu’il avait de très bonnes mains à plusieurs reprises en déjouant plusieurs adversaires lors de belles percées offensives.

En fait, habitué à jouer contre des hommes dans une très bonne ligue en Suède (SHL) ça avait souvent l’air très facile en ce début juillet à 4 contre 4 à Brossard pour ce choix de 3e ronde en 2022 (92e), sélectionné 30 rangs derrière Lane Hutson.

J’en suis maintenant convaincu, en Engstrom, 37 points en 66 matchs, toute compétition confondue l’an dernier, le Canadien tient un autre défenseur qui jouera un jour dans un top-4 dans la LNH.

Trop de talent, de qualités et de chien (compete level) pour ne voir en lui qu’un simple défenseur de troisième paire.

En tous cas, au même âge, il est très loin devant Jordan Harris – ce n’est même pas proche – et on se rappellera que plusieurs voyaient Harris dans leur soupe à l’époque…

Faites la règle de trois.

3. Joshua Roy : C’est facile jouer au hockey!

Égal à lui-même, toujours avec un timing impressionnant dans son jeu, Roy a multiplié les passes savantes durant toute la rencontre en plus de converger régulièrement au filet pour faire dévier les tirs de la pointe comme à son habitude.

Plutôt que de trouver qu’il se traîne les pieds sur la glace, je vois plutôt un attaquant qui joue avec ses neurones et qui ne fait jamais d’enjambées inutiles. C’est vrai autant à l’attaque qu’en défensive, où il semble toujours deviner le prochain geste de l’adversaire un ou deux jeux à l’avance.

Offensivement, Roy trouve l’espace libre sur la glace et semble toujours être au bon endroit au bon moment. Et bien sûr, faut pas négliger sa capacité à mettre la rondelle dans le filet. Il a d’ailleurs été le seul joueur à marquer en tir de barrage :

Je ne serais pas prêt à le classer comme meilleur espoir du Canadien comme l’a fait Craig Button, mais j’ai encore en tête sa performance désarmante au CMJ au côté de Connor Bedard et j’ai très hâte de voir comment se fera son adaptation chez les pros.

Pour l’instant, disons que je le vois éventuellement comme un progrès par rapport aux Hoffman, Byron et Drouin qui ont patrouillé l’aile gauche sur de multiples trios ces dernières années et, grâce à son sang-froid et son sens du jeu, je ne crois pas qu’il aura besoin de passer plusieurs hivers à Laval…

Sans oublier que Hoffman, Dvorak, Evans, Gallagher et Armia ne sont plus exactement des must dans la formation. Moyennant de bonnes performances au camp et à Laval et quelques mouvements de personnels, tôt ou tard, il y aura de la place pour Roy dans la formation.

Comme on l’a vu au CMJ avant d’être promu avec Bedard, on sait qu’il peut jouer avec panache sur un 3e trio.

Mais ce gars-là sait vraiment jouer au hockey et il sait le faire avec des gars de talent autour de lui.

Qui sait s’il ne se trouvera pas à la gauche de Suzuki et Caufield avant longtemps?

4. Struble : Une sage décision de l’avoir mis sous contrat

Jayden Struble n’a certainement pas connu la progression auquel je m’attendais de lui à Northeastern. Un peu dans l’ombre de Harris à ces premières années, il n’a pas dominé offensivement comme on l’aurait anticipé à sa dernière année alors qu’Harris évoluait à Montréal.

Il s’est plutôt concentré sur sa défensive ainsi que la simplification de son jeu et est demeuré en santé pour une deuxième année consécutive.

Struble
Il semble y avoir une certaine utilité pour lui dans l’organisation.
(Crédit: Tony Patoine)

Le joueur qu’on a vu hier était mobile, solide, efficace et a été en mesure d’arrêter une montée de Logan Mailloux par un bon contact physique.

Voilà un type qui semble vouloir se forger une identité bien à lui dans l’organigramme montréalais dans une style qui se prêterait bien à un défenseur de troisième paire. De défenseur à haut risque qu’il était à son arrivée à l’université, il est devenu un défenseur très stable qui inspire confiance.

Advenant quelques blessures en haut, je ne serais pas du tout surpris que l’on voit celui qui aura déjà 22 ans en septembre donner ses premiers coups de patin dans la LNH en cours de saison.

5. Logan Mailloux : Mettra-t-il la pression sur Kovacevic et Barron dès le camp d’entraînement?

Comme à peu près tous ses principaux collègues à la ligne bleue, Logan Mailloux a été bon hier à Brossard. Plutôt discret en début de match, je dirais qu’il s’est davantage signalé dans la deuxième moitié de la rencontre.

On voudra sans doute lui donner du millage à Laval en 2023-2024, lui qui n’aura joué qu’un total de 120 matchs dans la OHL, séries incluses, enregistrant 90 points au passage.

Il sera tout de même très intéressant de voir où il se situe au camp d’entraînement par rapport aux autres droitiers, Justin Barron et Johnathan Kovacevic, qui ne pourront se permettre de prendre quoi que ce soit pour acquis en septembre.

6. Mesar : Ne tirons aucune conclusion de son passage à Kitchener

Ce fut d’une certaine façon une saison d’adaptation au hockey nord-américain moins évidente pour Filip Mesar que pour son compatriote Juraj Slafkovsky. Même si la LNH est la meilleure ligue au monde, les choses ont été plus simples pour le gros #20, qui n’a pas eu à déménager et à se questionner trop longtemps. Tout était pour ainsi dire un peu décidé pour lui et il aurait vraiment fallu qu’il paraisse très mal au camp d’entraînement ou tôt dans la saison pour qu’on l’envoie continuer son développement sous d’autres cieux.

Dans le cas de Mesar, il a connu un très bon camp à Montréal, puis on a pensé le faire jouer à Laval avant de finalement se raviser et de l’envoyer dans la OHL, où il a connu une saison en demi-teinte avec des hauts et des bas entrecoupé par le CMJ.

Mesar a plutôt bien paru hier au côté d’Owen Beck.
(Crédit: Tony Patoine)

Mais, même si je lui aurais préféré le Tchèque Jiri Kulich – sélectionné deux rangs après lui par les Sabres en 2022 (28e) et dominant en AHL l’an passé -, à le voir aller hier, Mesar demeure un bon espoir à l’attaque pour le Canadien.

Ce n’est d’ailleurs pas tout le monde qui peut tirer une rondelle de cette façon :

On peut encore percevoir une espèce d’entre-deux entre Ylonen et Lehkonen, un attaquant intelligent de 3etrio capable de produire offensivement et dépanner dans le top-6 au besoin.

C’est vraiment son adaptation dans la AHL dans une année que l’on souhaite un peu plus stable qui nous en dira davantage sur son véritable potentiel.

Voilà, c’est tout pour aujourd’hui!

On remet ça bientôt avec un article qui creusera un peu plus la réflexion sur la suite des choses et une certaine catastrophe à éviter du côté de la défensive du Tricolore!

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