La saison 23-24 du CH en 10 épisodes

Chaque saison du Tricolore est un peu comme un téléroman avec sa trame narrative principale agrémentée des tribulations des principaux protagonistes.

À titre de bilan de fin de saison, j’ai donc pensé y aller d’un petit survol des 10 principales histoires de cette saison 23-24, une troisième consécutive sans séries dans la métropole.

Voici ce que ça donne.

1. L’état-major de l’équipe suit son plan
Consciente de la position du CH et de la direction à donner à l’équipe dès son entrée en poste la « nouvelle administration » n’a toujours pas dérogé de son plan. La reconstruction est toujours la principale trame narrative autour de l’équipe. C’est peut-être une histoire plate à mourir pour certains, mais pour une équipe qui, selon ma perspective, est rendue à l’an 7 se sa reconstruction en deux phases (si on remonte à l’arrivée de Suzuki en 2018 et qu’on oublie la finale de 2021), tout indique qu’on vient d’assister à la dernière année où un des objectifs était de terminer le plus bas possible au classement. Cela n’a pas empêché de faire progresser le jeune noyau dont le plus vieux membre n’a pas encore 25 ans. Le prochain chapitre de cette trame narrative s’écrira lors du repêchage en juin, alors que le CH, grâce à l’échange de Sean Monahan, bénéficiera de deux choix de première ronde qui lui fourniront de multiples options.

2. La blessure fatale de Kirby Dach au 2e match de la saison
Épisode troublant dès le deuxième match de la saison : Dach, alors le meilleur attaquant de l’équipe selon plusieurs (je m’inclus dans le lot) se blesse pour le RESTANT de l’année (coup de tonnerre)! Comme on l’envisageait dès octobre, on a effectivement dû s’administrer tous les remèdes stoïciens imaginables pour passer à travers l’hiver, incluant une dose quotidienne de Tankathon depuis quelques mois! Mais justement, sans blessure à Dach, le CH termine probablement dans le no man’s land et ne peut penser à ajouter un autre talent de niveau top-5 au prochain repêchage, ce dont il aurait encore eu le plus besoin anyway! En pleine reconstruction, le bon stoïcien, capable de diriger son narratif intérieur,  peut alors se dire en toute sérénité qu’une meilleure chose n’aurait pu arriver au Tricolore en 23-24!

3. Slafkovsky a presque réalisé la prédiction de 55 points de ESPN!
Les gens de ESPN se sont fait traiter de tous les noms l’automne dernier lorsqu’ils ont osé prédire une saison de 55 points à Juraj Slafkovsky. J’étais moi-même le premier à croire qu’ils étaient tombé sur la tête! Même un supposé prodige comme Jack Hughes n’était même pas passé proche de réaliser un tel exploit à 19 ans. Slaf n’ayant enregistré que 10 points en 39 matchs l’an dernier, la chose était presque de l’ordre de l’INCONCEVABLE! La vérité c’est que n’eut été d’un passage à vide d’une quinzaine de matchs suite à la blessure de son centre Kirby Dach, Slaf aurait fort probablement dépassé la marque des 55 points, lui qui a enregistré 48 points à ses 68 derniers matchs (58 points sur 82 matchs). Qu’importe, 20 buts, 50 points à sa saison de 19 ans (il a eu 20 ans le 30 mars), sa deuxième dans le LNH, ça se compare avantageusement à tous les meilleurs power forwards des 10 dernières années: Draisaitl, Rantanen, les deux frères Tkachuk, Meier, etc. Le potentiel de supervedette qu’on voyait en lui avant même son repêchage s’est actualisé sous nos yeux de semaine en semaine, de match en match. Et ce n’est encore que le début…

4. Le développement et l’arrivée de Lane Hutson
Tiens, parlant de superstars, jasons aussi de celui qui a permis à Slaf d’inscrire son 20e but… Sauf pour les deux revers qu’il a connu en séries au hockey universitaire américain, ce fut une autre saison de rêve pour Hutson. Superbe performance individuelle une fois de plus avec Boston University, médaille d’or avec les USA au CMJ en tant que défenseur numéro un et débuts archi-prometteurs dans la LNH avec l’équipe qui l’a repêché au 62e rang il n’y a même pas deux ans. Aucun défi ne semble trop grand pour le « Lil Lane ». Dire comme on ne cesse de l’attendre qu’il ne faut pas le mettre dans la même phrase que Hughes, Makar et Fox c’est simplement être « chicken ». Il les a tous battu fair and square à 18 et 19 ans dans la NCAA! Pourquoi serait-ce soudainement moins bon qu’eux à ses débuts dans la LNH? Celle-ci se retrouve-t-elle dans un vortex spatio-temporel peuplé d’extra-terrestres au sang vert qui vivent sans oxygène dans de l’eau brune? À en croire la logique de certains à la radio et à la télé au cours des derniers mois, ça semble être le cas! Hutson est une future supervedette. Si ça ne crève pas encore plus les yeux maintenant, ça va prendre quoi? Bref, je ne suis pas encore tout à fait prêt à dire qu’il sera moins important aux succès du CH que Slafkovsky

5. Une saison sans ralentissement pour Suzuki
Depuis son arrivée avec l’équipe, Nick Suzuki nous avait habitué à un passage à vide annuel où il ralentissait drastiquement pendant une quinzaine de matchs. On avait l’impression qu’il se mettait soudainement à traîner un piano. Rien de tout ça ne s’est produit cette saison. Le # 14 n’aura jamais passé plus de quatre matchs sans s’inscrire au pointage et son niveau d’énergie a été d’une constance exemplaire. Avec ses 33 buts et 77 points, on a surtout apprécié la qualité supérieure de sa finition cette saison, comme ici :

On peut toujours débattre quant à savoir si Suzuki est un premier centre digne d’une équipe championne, mais il ne fait aucun doute qu’il peut faire partie des ingrédients d’un éventuel top-6 pouvant conduire aux grands honneurs. Du moins, il aura formé une unité qui ressemblait à un véritable premier trio en compagnie de Slaf et Caufield en 2e moitié de saison.

6. Une campagne « record » dans un quasi anonymat pour Matheson!
S’il y a bien un joueur qui n’a pas obtenu la reconnaissance souhaitée cette saison, c’est bien Mike Matheson ! Étrangement, l’ultra-fluide patineur Québécois, originaire de l’Ouest de l’ile de Montréal, ne soulève pas les passions malgré un jeu spectaculaire sur la patinoire. La personnalité affable et discrète de l’individu ainsi que son salaire très raisonnable détonnent avec Subban, le dernier défenseur à avoir produit une saison de plus de 60 points à Montréal. Ça explique bien des choses, mais quand même. Certains ont développé une début d’urticaire à force de critiquer ses nombreux revirements. Mais gageons que son approche et son rôle seront légèrement différents l’an prochain avec un Lane Hutson dans la formation…

7. Martin St-Louis a toujours les deux mains sur le volant
Un peu plus de deux ans après son embauche, St-Louis possède toujours le même ascendant sur ses troupiers. Sans manquer de respect à Nick Suzuki, avancer que le pilote Québécois est le véritable « leader » du Canadien de Montréal ne relève pas de l’hérésie. Il a rempli à merveille le mandat qu’on lui a confié jusqu’ici, soit celui d’assurer le développement du jeune noyau grâce à ses qualités de pédagogue hors pair. À compter de l’an prochain, le mandat risque de changer un peu alors que l’équipe visera ouvertement une place en séries. Ce sera à lui de s’ajuster. Il parlait justement en ce sens lors de son bilan mardi dernier…

8. Une performance à la hauteur des attentes pour Newhook
Ce n’est pas tout le monde qui dansait en rond autour du feu en se tenant par la main lorsque Kent Hughes a cédé les choix 31 et 37 en juin dernier pour acquérir Alex Newhook, lui-même un 16e choix au total en 2019. Personne n’osera encore crier au vol, mais en présentant un effort constant qui lui aurait permis une production de 50 points sur 82 matchs, le Terre-neuvien a sans doute satisfait ses patrons. On lui reconnaît entre autres une dégaine rapide et une belle touche de marqueur autour du but adverse. Il devra cependant apprendre à exploiter encore mieux sa vitesse en entrée de zone et à faire preuve d’un peu plus de patience avec la rondelle.

9. Une belle entrée chez les pros pour Mailloux
En voilà un autre qui a livré la marchandise cette saison, sa première chez les pros. Même si c’est encore loin d’être parfait défensivement, ainsi qu’au niveau de la discipline et de la prise de décision, Mailloux a été le meilleur défenseur offensif recrue de toute la LAH, se classant même au troisième rang des pointeurs chez les arrières du circuit. Encore difficile de dire quel est le véritable plafond de Mailloux dans la LNH, mais nul doute qu’ils possèdent les outils pour y connaître du succès. On ne connait toujours pas trop les plans et l’attachement de l’organisation à son endroit. Mais chose certaine, quoi qu’il arrive, sa valeur d’usage ET sa valeur d’échange ont augmenté cette année.

10. Le retour en force de Joel Armia et l’arrivée de Joshua Roy
Après sa commotion cérébrale subie « au coude » de Tyler Myers en 2021 et le contrat qu’il a signé avec Marc Bergevin après la finale de la Coupe Stanley lors de cette même année, la production de Armia a chuté drastiquement. Certains soirs, le Finlandais peinait à ressembler à un joueur de la LNH. Quelques passages à Laval accompagnés de rencontres avec un psychologue sportif auront suffi à rallumer la flamme. Le Canadien aura encore un an pour décider de l’avenir de son énigmatique ailier, un « plombier de luxe » de grande qualité quand tout va bien.

Un autre solide acteur de soutien s’est ajouté à la formation en cours de route, un peu comme on l’anticipait à la fin du camp d’entraînement : Joshua Roy. En voilà un qui pourrait obtenir une belle audition au sein du deuxième trio l’an prochain. À tout le moins, Roy a le profil pour faire partie du top-9 d’un club champion avec son remarquable sens du jeu.

Prolongation

Conclusion
Il y aurait bien sûr eu de moins belles histoires à raconter comme la chute brutale de Josh Anderson, la déception nommée Jesse Ylonen, le début de saison difficile de Gallagher, la progression plutôt invisible de Guhle, Caufield qui n’a pas atteint la marque des 30 buts, sans oublier les renvois à Laval de Xhekaj et Barron.

Avoir été cruel, on aurait aussi parlé de l’histoire archi-plate du « ménage à trois » qui a meublé des heures et des heures de temps d’antenne absolument insipides.

Mais bon, rien pour écrire à sa mère dans le grand ordre cosmique des choses!

Dans le portrait général, de façon un peu imprévue, 23-24 aura surtout servi à prendre un pas de recul additionnel afin d’aller encore plus loin dans les prochaines années. Ou, si on préfère la construction à la course à pied, cette dernière campagne permettra d’ajouter un plus gros bloc qu’anticipé à la fondation de l’équipe en juin prochain.

On a déjà très hâte à la loterie, puis ensuite de voir la binette de celui qui montera sur la scène à Vegas pour aller serrer la pince de ses nouveaux patrons au début de la première ronde… On risque de jaser pas mal de ces « binettes potentielles  » dans les deux prochains mois.

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