LPHF : les filles méritent mieux

Lancer un nouveau produit commercial n’est jamais une mince affaire. Surtout quand d’autres ont échoué en tentant de faire la même chose que toi précédemment.

J’en sais quelque chose : ça fait deux, trois ans que je jongle entre deux idées de podcast… que je n’ai jamais lancé puisque je ne souhaite pas le faire à la va-vite.

J’adore l’initiative de la LPHF (ou PWHL pour les Anglophones parmi vous), une ligue professionnelle de hockey féminin fondée en août dernier par Mark Walter et son groupe d’investisseurs. Six équipes participeront à la première saison de la ligue, soit trois au Canada (Montréal, Toronto et Ottawa) et trois aux États-Unis (Boston, New York et Minnesota).

La ligue a tenté de faire les choses de façon sérieuse, allant même jusqu’à créer un syndicat des joueuses… dirigé par Brian Burke. Au moins, les deux partis se sont entendus sur une entente de huit saisons.

Mais à plusieurs autres niveaux, la nouvelle ligue professionnelle a fait preuve d’amateurisme… ou du moins, d’empressement et de manque d’expérience et/ou de vision.

Quand tu as vu la défunte CWHL s’éteindre après seulement cinq ans d’existence… et la NWHL devenir la PHF, puis disparaître, il faut que tu fasses un sans faute quand tu décides de lancer ton produit (ici une nouvelle ligue de hockey féminine professionnelle).

Mais les erreurs ont été nombreuses jusqu’ici et le premier match n’a pas encore été disputé.

On avait décidé de six noms d’équipe (Boston Wicked, Minnesota Superior, Montreal Echo, New York Sound, Ottawa Alert et Toronto Torch)… mais quelques protestations sociales ont eu pour effet qu’au départ, la ligue aura six noms de ville et six kits de couleurs, mais pas de noms d’équipe… et pas de logos!

Ce n’est pas l’idéal quand tu souhaites connecter avec ton nouveau fanbase local…

Le calendrier a été publié tard durant l’automne, ce qui ne laisse pas beaucoup de temps pour tenter de vendre des billets. D’ailleurs, aucune équipe n’a encore mis ses billets individuels en vente à l’heure de vous écrire ces lignes.

Les saisons compteront 32 rencontres et se joueront de novembre à mai, mais pour toutes sortes de raisons, la première campagne ne sera que de 24 matchs et elle se disputera de janvier à mai ou juin (2024), elle.

Les équipes joueront dans des arénas de moins de 4 000 places (à Toronto)… mais aussi dans des amphithéâtres de près de 20 000 sièges (New York et Minnesota). Au moins, à Montréal, plusieurs abonnements de saison dans l’Auditorium de Verdun ont déjà trouvé preneur. Ce n’est pas comme ça partout!

Certains voient le verre à moitié plein, en se disant que la ligue partait de zéro et qu’en quatre mois, elle a accompli de petits miracles

D’autres ne comprennent pas comment des erreurs faciles à éviter ont pu être commises… et sont encore commises aujourd’hui. Aurait-on dû attendre un an de plus avant de lancer le projet? Peut-être…

C’est comme si on tentait de peinturer les murs, mais que les joints n’avaient pas encore été tirés.

Encore ce matin, on apprenait que la ligue ne va pas divulguer la nature des blessures subies par ses joueuses. En fait, ce sera encore pire que dans la LNH : on ne dira même pas s’il s’agit d’une blessure au bas ou au haut du corps!

T’sais, quand tu pars un nouveau projet, tu dois regarder ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas ailleurs. Tu dois tenter de faire aussi bien qu’ailleurs, voire même mieux. Or, la politique de cacher les réelles blessures de la LNH – contrairement à une ligue comme la NFL – en fait rager plus d’un en Amérique du nord.

Tu as la chance de partir de zéro : améliore cet aspect-là dans ta ligue, au lieu de l’empirer. Ce sont de petites erreurs niaiseuses que tu peux facilement éviter.

Je sais, il y a l’aspect confidentialité médical qui entre en jeu, mais avec l’information qui se promène sur les réseaux sociaux, les sites de paris en lignes – légaux et illégaux – qui se multiplient un peu partout et le défi constant de vendre du hockey féminin, il me semble que tu aurais dû éviter de te peinturer ainsi.

Les filles réclament souvent de meilleures conditions lorsqu’elles jouent au hockey et elles ont entièrement raison de le faire. Elles méritent mieux.

Il faut espérer que le produit de la LPHF n’aura pas été créé trop vite et qu’il ne fera pas comme ses prédécesseurs, soit disparaître trop rapidement, justement. Le hockey féminin mérite de fleurir, et non de faner. Et les jeunes partisanes méritent d’avoir de vraies modèles féminins de qui s’inspirer.

La LPHF prétend avoir une vision à long terme avec son produit : espérons que les quelques difficultés à court terme ne viendront pas tuer dans l’œuf un projet hautement intéressant. Ne répétons pas les mêmes erreurs du passé. On ne pourra pas toujours compter sur l’argent chinois pour tenter de sauver notre produit nord-américain…

À noter que le salaire minimum devrait être de 35 000 $ et le salaire moyen, de 55 000 $ environ… et que les joueuses réservistes ne l’auront pas facile.

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